En thérapie, depuis Freud semble t’il, on parle sans cesse de l’inconscient. Qu’est ce que notre inconscient ? Est ce que c’est vrai que Sigmund Freud l’a découvert le premier ? Que veut signifie d’ailleurs Freud ? Et surtout qu’en est il maintenant avec les neurosciences ? Finalement comment le considère t’on en Thérapie TCC et dans ma pratique ?

Vaste sujet !

L’inconscient avant Freud

Dés le 18ème siècle Leibnitz postulait l’existence de représentations mentales inconscientes. Mais avant certainement, on savait qu’il y avait des phénomènes mentaux qui n’étaient pas conscients. On n’en parlait pas avec ces mots mais avec des concepts de Dieux, de possessions, de surnaturel, voire de dons ou de folie.

Mais Descartes au 16ème siècle avec son célèbre “Je pense donc je suis” donne toute la priorité à la Conscience. Je suis, je décide parce que je suis conscient. Donc pas d’importance aux phénomènes non conscients.

Spinoza lui donne bien plus d’importance aux émotions profondes. Spinoza renverse une conception commune du désir selon laquelle l’homme préfère une chose parce qu’il la juge bonne : « ce qui fonde l’effort, le vouloir, l’appétit, le désir, ce n’est pas qu’on ait jugé qu’une chose est bonne ; mais, au contraire, on juge qu’une chose est bonne par cela même qu’on y tend par l’effort, le vouloir, l’appétit, le désir. » (Éthique IIIProp. 9, scolie). Ce qui est premier chez Spinoza, c’est l’idée et le désir — la conscience, elle, n’apportant rien à l’appétit. La conscience ne sera pas, comme chez Descartes, l’expression de la volonté infinie de l’homme, mais une simple réflexion (pouvant être adéquate mais ne l’étant pas le plus souvent). Il y a là déjà la primauté de processus non conscient, les émotions. Nous y reviendrons sans cesse car c’est le coeur même de notre pratique.

A. Damasio un des plus grands neuro-scientifiques actuels a écrit : “L’erreur de Descartes” et “Spinoza avait raison”. Là aussi on écrira longuement sur ce génie qui a orienté d’ailleurs toute mes recherches et compréhensions de mon travail thérapeutique.

Donc bien avant Freud, on pressent très bien qu’il y a des processus non-conscients. ainsi Laycock en 1884 disait qu'”une grande partie de notre activité mentale, intellectuelle est essentiellement automatique et peut avoir lieu inconsciemment”.

Donc à la fin du 19ème siècle, on discutait déjà depuis longtemps d’inconscient psychique.

L’inconscient de Freud

Je ne suis pas en mesure intellectuelle, et encore moins dans un petit article comme celui-ci, de détailler toute l’oeuvre de Freud. Mais ce qui ressort est la notion d’une partie cachée des processus mentaux parce que refoulé. Il a déni de conscience parce qu’on ne veut pas savoir, parce qu’on ne doit pas savoir, parce qu’on n’en a peur. C’est le refoulement !

Il y a la notion d’un deuxième cerveau sobre et peuplé d’images et d’idées “mauvaises” qu’il faut mettre à jour consciemment pour vivre bien, libre. L’inconscient de Freud n’est pas sympathique, il nous diminue parce qu’il nous guide sans notre conscience éclairée. Toutes les analyses psychanalytiques vont s’efforcer de le dévoiler pour le gouverner.

Pourtant il a l’idée importante et toujours bien actuelle de la possibilité d’élaborer des contenus mentaux riches et abstraits inconsciemment. Et même que nous pensons d’abord inconsciemment. Voir plus loin ce qu’on sait avec les travaux de Libet.

Ce qui n’est vraiment plus actuel, c’est cette notion de refoulé ! Les idées inconscientes ne peuvent devenir conscientes PARCE QU’il y a CENSURE. Il y a un GARDIEN inconscient qui repousse certaines idées inconscientes. Où est ce gardien ? D’autres aspects de la pensée de Freud sont curieux comme la part importante de l’infantile, de la sexualité déniée, etc..

Refoulement

Pour en savoir bien plus lisez “Le nouvel Inconscient” de Lionel Naccache, c’est évidemment bien plus précis et riche que ce petit article.

L’avancée actuelle des neuro-sciences

En quelques mots bien trop pauvres, les sciences actuelles ont bien précisé les processus mentaux inconscients et leur ont donné une belle place dans nos cerveaux.

Freud cherchait s’il y avait une zone précise du cerveau où se logeait l’Inconscient. Aujourd’hui on sait qu’il y a une myriade de processus inconscient dans tout le cerveau, partout. Il n’y a donc pas UN Inconscient avec une grande majuscule mais des processus qui ne ne sont pas conscients.

Il n’y a pas de refoulement inconscient avec un Gardien de la censure mais une attention consciente qui nous fait remarquer ou non ces processus inconscients. Certains d’ailleurs ne remontent jamais à la conscience comme tous les paramètres vitaux physiologiques (battements du coeur, taux des hormones, du sucre, etc..), la respiration pouvant être elle consciente mais la plupart du temps un processus inconscient.

Nos processus inconscients élaborent des idées abstraites, manient les mots mêmes, les concepts mais surtout les images sensorielles. Chaque entrée sensorielle est d’abord décodée inconsciemment avant d’être éventuellement portée à la conscience.

Depuis Benjamin Libet (1916-2007) on sait que “lorsque nous décidons consciemment d’une action, nous sélectionnons parmi les innombrables actions potentielles qui sont inconsciemment représentées en permanence dans notre esprit, celle qui répond à nos attentes et motivations conscientes. Décider c’est choisir parmi des processus inconscients riches, prolifiques et évanescents.” (L. Naccache)

 L’immense apport de Antonio Damasio

Nous reprendrons ce paragraphe en un grand article parce qu’il est très important.

A. Damasio, (lire sa fiche Wikipédia ici) a révolutionné les neurosciences en s’intéressant à un domaine qu’il n’était pas sérieux d’étudier, à l’époque : Les EMOTIONS ! Pas scientifique !

Il a mis en évidence les marqueurs somatiques c’est à dire des états du corps qui apparaissent automatiquement, inconsciemment en réaction à des stimuli sensoriels. Ce sont nos émotions, purs états physiques inconscients, qui deviennent conscientes sous la forme de sentiments quand elles se portent à notre attention.

L’inconscient des thérapies TCC

Ces processus inconscients que sont les émotions sont principalement ceux sur lesquels nous travaillons en thérapie TCC. Ce ne sont donc pas des refoulements freudiens mais tout bonnement des processus acquis pour notre bien mais devenus inadéquats. L’inconscient devenu sympathique et voulant notre bien depuis M. Erickson, devenu multiples et omni présent depuis les neurosciences est accessible dés lors qu’on sait ce qu’il est et comment il apprend, comment il peut changer.

Couleurs des émotions

C’est pourquoi les thérapies TCC agissent vite et bien, quand on sait sur quoi on travaille on peut obtenir bien plus facilement des résultats corrects.

Quel long chemin et sans doute beaucoup est encore à découvrir sur notre fonctionnement mental, au coeur même de nos vies.